Paris : l’image d’un élu avec un rat relance le débat sur la gestion urbaine des rongeurs

✍️ Auteur : Élyas Varenne  |  🗓️ Publié le : 27 octobre 2025

La scène insolite dans le 11ᵉ arrondissement soulève des questions sanitaires et de régulation, dans une ville où les rats font partie du quotidien urbain.

Paris — 30 septembre 2025. Grégory Moreau, adjoint au maire du 11ᵉ arrondissement et membre du Parti animaliste, a été aperçu la semaine dernière sur le marché de Belleville avec un rat domestique nommé Plume sur l’épaule. L’image, reprise par plusieurs médias et abondamment relayée sur les réseaux sociaux, a immédiatement suscité un débat : faut-il changer notre regard sur les rats ou rappeler les réalités sanitaires et urbaines qu’ils représentent ?

Un discours militant très assumé

Sur place, l’élu n’a rien laissé au hasard. Il interpelle directement les passants : « Bonjour, avez-vous déjà rencontré un rat ? Regardez ce que je porte sur l’épaule », lance-t-il à une habitante interloquée. Cette phrase a été prononcée lors de sa campagne de sensibilisation sur le marché de Belleville, rapportée par Le JDD (17/09/2025).

Grégory Moreau défend une position claire : « Les rats ne sont pas nos ennemis. Ils participent à leur manière au fonctionnement de la ville. Ils mangent les déchets que nous laissons derrière nous ». Il a avancé cet argument à plusieurs reprises, notamment dans l’émission Pascal Praud et vous sur Europe 1 (01/09/2025), où il a également affirmé que les rats consommaient « environ 75 tonnes de déchets organiques par jour » à Paris. Une déclaration similaire a été faite sur CNEWS : « Sans les surmulots de Paris, on déplorerait 75 tonnes de déchets en plus » (01/09/2025).

Il ajoute dans la même émission : « Le rat ne pose pas de problème sanitaire à Paris », en cherchant à relativiser les risques associés à ces animaux dans un contexte urbain moderne.

Rats domestiques et rats urbains : une distinction essentielle

Si Plume, le rat domestique posé sur l’épaule de l’élu, attire la sympathie, la réalité des rats urbains est bien différente. À Paris, on estime que leur population dépasse largement celle des habitants humains, avec des concentrations particulièrement élevées dans les réseaux d’égouts, les caves anciennes et les zones où la gestion des déchets est difficile.

Les rats domestiques, élevés en captivité, sont habitués au contact humain et vivent dans des environnements contrôlés. Ils ne sont pas porteurs des mêmes pathogènes que leurs cousins sauvages et ne présentent pas de danger particulier dans ce cadre.

À l’inverse, les rats urbains — principalement des surmulots (Rattus norvegicus) — évoluent dans des milieux humides, souterrains ou encombrés. Ils sont des réservoirs potentiels de plusieurs maladies, notamment la leptospirose. Cette infection bactérienne, transmise par l’urine de rongeur dans les eaux stagnantes, peut provoquer des complications graves chez l’humain. Santé publique France enregistre chaque année plusieurs dizaines de cas, souvent après des contacts indirects dans des milieux urbains ou périurbains.

Les experts en gestion parasitaire soulignent aussi la capacité de prolifération rapide de ces rongeurs : une femelle peut avoir jusqu’à 6 portées par an, ce qui explique la résilience de ces populations dans les villes où la nourriture est abondante.

🟦 Encadré technique — Rats urbains : repères sanitaires et urbains
• Transmission principale : leptospirose via urine contaminée, cas rares mais réels.
• Espaces favorables : réseaux d’égouts, caves anciennes, zones à déchets mal gérés.
• Régulation efficace : réduction des points alimentaires, assainissement, piégeage raisonné — pas d’éradication totale possible en ville dense.

Des chiffres à manier avec précaution

L’affirmation des « 75 tonnes de détritus mangées par jour » reste non vérifiée par la Ville de Paris. Elle provient exclusivement des déclarations de Grégory Moreau dans la presse et les médias audiovisuels. En revanche, les chiffres officiels permettent de contextualiser :

  • 3 000 tonnes de déchets ménagers produits quotidiennement à Paris (Direction de la Propreté, 2024).
  • 4 200 interventions de régulation ciblée recensées en 2024, principalement dans les espaces publics sensibles (aires de jeux, berges, écoles).
  • 1,7 million d’euros de budget alloué aux opérations de dératisation en 2024.

Ces chiffres illustrent la complexité du phénomène : la présence des rats est étroitement liée à la gestion des déchets et des infrastructures souterraines, bien plus qu’à leur simple “utilité écologique”.

Communication symbolique vs gestion quotidienne

L’initiative de Moreau divise profondément. Ses partisans y voient une tentative audacieuse de faire évoluer les mentalités. Ses opposants, notamment certains élus d’arrondissements plus aisés, estiment au contraire que cette communication « sympathique » masque la réalité quotidienne des Parisiens confrontés à des rats dans les immeubles et les parcs.

« Nous devons garder une approche équilibrée : reconnaître la présence de ces animaux dans l’écosystème urbain tout en protégeant la santé publique », estime une source au sein de la Direction de la Propreté de Paris (30/09/2025).

La stratégie actuelle de la Ville repose sur une approche IPM (Integrated Pest Management) : entretien des réseaux, fermeture des points de nourrissage, piégeage raisonné et suppression des appâts chimiques permanents, souvent inefficaces à long terme.

Et maintenant ?

Cette polémique intervient alors que la mairie doit présenter son nouveau plan triennal de lutte contre les nuisibles. Celui-ci prévoit notamment des investissements dans la modernisation des bouches d’égouts, la réduction des dépôts sauvages et le renforcement de la surveillance dans les lieux sensibles comme les écoles et les parcs.

Le buzz autour du rat Plume pourrait, paradoxalement, servir de déclencheur pour relancer un débat technique et politique sur la gestion des populations de rongeurs dans la capitale.

Élyas Varenne

Élyas Varenne est spécialiste des nuisibles urbains et de la veille 3D (dératisation, désinsectisation, désinfection). Passionné par le sujet, il suit les infestations au plus près du terrain et s’intéresse aux réalités vécues par les habitants. Il accompagne régulièrement les techniciens en intervention, observe les méthodes, les résultats et les difficultés de terrain. Au quotidien, il transforme ces retours concrets en informations claires et utiles pour comprendre ce qui se joue dans nos villes.

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