Automne : les moustiques-tigres prolongent leur saison sous l'effet d'un climat exceptionnellement doux

✍️ Auteur : Solution Nuisible  |  🗓️ Publié le : 24 octobre 2025

Alors que les premiers froids auraient dû marquer la fin de leur activité, les moustiques-tigres continuent de piquer en France métropolitaine. Une situation inédite qui s’accompagne d’un nombre record de cas autochtones de chikungunya et soulève de nouvelles interrogations sur l’adaptation de ces vecteurs au changement climatique.

France métropolitaine — Octobre 2025. Malgré l’arrivée de l’automne, le moustique-tigre Aedes albopictus maintient une activité inhabituelle sur une large partie du territoire français. Au 29 septembre, Santé publique France recensait 633 cas autochtones de chikungunya répartis en 69 foyers épidémiques, un niveau jamais atteint en métropole. À cela s’ajoutent 26 cas de dengue transmis localement et 41 cas de fièvre West Nile, dont plusieurs dans des régions jusqu’alors épargnées par ces virus tropicaux.

Un automne doux qui repousse les limites saisonnières

Les conditions météorologiques exceptionnellement clémentes de septembre et octobre 2025 expliquent en grande partie cette prolongation d’activité. Habituellement, les températures automnales déclenchent la diapause — une forme d’hibernation — chez le moustique-tigre, réduisant considérablement sa présence dès la mi-septembre. Cette année, la douceur persistante bouleverse ce cycle naturel.

« Les moustiques, quand il fait froid, se mettent en diapause. Donc là en ce moment, il fait chaud et humide donc ils profitent », explique le Dr Arezki Irzi, entomologiste et parasitologue à l’hôpital Avicenne de Bobigny, interrogé le 30 octobre 2024 par BFMTV. Ce phénomène s’observe sur l’ensemble du territoire colonisé, où les moustiques adultes continuent de piquer bien au-delà de leur période d’activité habituelle.

Les données de Santé publique France confirment cette tendance préoccupante. Entre le 1er mai et le 29 septembre 2025, la France métropolitaine a enregistré 669 cas autochtones d’arboviroses, dont 633 de chikungunya, 26 de dengue et 9 cas isolés de chikungunya sans lieu d’infection certain. Ces chiffres marquent une progression spectaculaire : une semaine plus tôt, le 22 septembre, on comptabilisait 570 cas de chikungunya, soit une augmentation de plus de 60 cas en sept jours.

Extension géographique : des régions jusqu’ici épargnées touchées pour la première fois

L’ampleur de cette saison 2025 ne tient pas uniquement au nombre de cas, mais également à leur répartition territoriale inédite. Pour la première fois, des cas autochtones de chikungunya ont été confirmés en Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val de Loire, Grand Est et Nouvelle-Aquitaine, selon le bulletin épidémiologique de Santé publique France publié le 1er octobre 2025.

Cette expansion s’explique par l’implantation désormais massive du moustique-tigre sur le territoire. Au 1er janvier 2025, le ministère de la Santé confirmait sa présence dans 81 départements sur 96, soit 84 % du territoire métropolitain. En Provence-Alpes-Côte d’Azur, région la plus touchée, 97 % de la population vit désormais en zone colonisée par Aedes albopictus.

« Plus la température est importante, plus la vitesse de développement des larves sera importante. Avec ce temps quasi estival, on est face à des conditions optimales pour la prolifération des moustiques », souligne Christophe Paupy, entomologiste et directeur de recherche à l’IRD de Montpellier, dans une intervention diffusée sur TF1 le 11 octobre 2023. Le scientifique confirme que le cycle de développement des larves, habituellement étalé sur plusieurs jours, s’accélère considérablement sous l’effet des températures élevées, multipliant les générations de moustiques.

Saison prolongée : quand l’automne ressemble à l’été
En temps normal, l’activité du moustique-tigre en France s’étend de mai à septembre. Mais le réchauffement climatique modifie cette temporalité. En Occitanie, des spécimens ont été capturés jusqu’en décembre 2023, selon l’IRD. Les températures douces retardent l’entrée en diapause des œufs, permettant aux larves de poursuivre leur développement. Les fortes pluies automnales créent par ailleurs de nouveaux gîtes larvaires (soucoupes, gouttières, pneus), accélérant la prolifération même hors saison estivale.

Antibes : un foyer explosif qui marque les esprits

Le 24 septembre 2025, la préfecture des Alpes-Maritimes a franchi un cap inédit en déclenchant pour la première fois le dispositif FR-Alert pour une alerte sanitaire liée aux moustiques. À 10 heures, un message a été envoyé sur les smartphones de toutes les personnes présentes à Antibes pour les informer de la détection de 103 cas autochtones de chikungunya dans la commune, le foyer le plus important jamais enregistré en France métropolitaine.

Cette flambée locale illustre la rapidité avec laquelle le virus peut se propager lorsque les conditions sont réunies : forte densité de moustiques-tigres, présence de personnes infectées en phase virémique et contacts répétés entre populations humaines et vecteurs. Au total, 140 cas ont été confirmés dans le département des Alpes-Maritimes et 312 en région Provence-Alpes-Côte d’Azur à la même date.

Face à cette situation, les autorités locales ont multiplié les interventions. « On fait de l’information pour que les gens évitent de laisser les pelouses trop arrosées, lavent leurs gouttières, évitent de laisser les coupelles sous les plantes », explique Éric Duplay, adjoint au maire d’Antibes délégué à la Santé publique, dans une interview accordée à RTL le 24 septembre 2025. La mairie a conduit des opérations de porte-à-porte, diffusé des SMS d’alerte et renforcé les campagnes de démoustication ciblée autour des cas confirmés.

pulvérisation anti-moustiques près d’une grille d’égout

Des risques sanitaires réels mais maîtrisables

Si les chiffres de 2025 marquent un tournant, il convient de replacer ces arboviroses dans leur contexte sanitaire. Le chikungunya, la dengue et le virus West Nile provoquent des symptômes variables selon les individus : fièvre élevée, éruptions cutanées, fortes douleurs articulaires dans 5 à 30 % des cas. La majorité des infections restent asymptomatiques ou bénignes, et les complications graves demeurent rares. Pour la fièvre West Nile, transmise par le moustique Culex et non par le moustique-tigre, les formes neurologiques sévères ne concernent que moins de 1 % des cas. Un décès d’un octogénaire a toutefois été enregistré parmi les 41 cas autochtones recensés en 2025.

« C’est vraiment la première fois qu’un niveau aussi important de cas autochtones en France métropolitaine est constaté. On ne peut pas parler encore d’épidémie, mais la situation est assez inquiétante », analyse le Dr Anne-Claude Crémieux, infectiologue à l’hôpital Saint-Louis de Paris, interrogée par Europe 1 le 25 septembre 2025. Elle souligne que l’importation massive de virus depuis La Réunion — où une épidémie de chikungunya sévit — et la présence généralisée du moustique-tigre « rebattent les cartes » en matière de transmission locale.

Les autorités sanitaires rappellent que la prévention repose avant tout sur l’élimination des gîtes larvaires. Chaque récipient contenant de l’eau stagnante — soucoupe de pot de fleurs, gouttière obstruée, pneu abandonné — peut abriter des centaines de larves. La suppression systématique de ces points d’eau limite drastiquement la prolifération des moustiques adultes, bien plus efficacement que les traitements insecticides appliqués en urgence autour des foyers épidémiques.

Mobilisation des autorités et perspectives pour 2026

Le 17 septembre 2025, Santé publique France et le ministère de la Santé ont publié un communiqué de presse conjoint alertant sur cette « recrudescence inédite » des arboviroses. Ils comptabilisaient alors 484 cas autochtones de chikungunya et 21 de dengue, avec une extension à des régions jusqu’ici épargnées. Les autorités ont appelé la population à maintenir une vigilance élevée jusqu’à la fin de la saison de transmission, officiellement fixée au 30 novembre, et ont rappelé les gestes de prévention indispensables : porter des vêtements longs, utiliser des répulsifs, installer des moustiquaires et supprimer systématiquement les eaux stagnantes autour des habitations.

En Nouvelle-Aquitaine, l’Agence Régionale de Santé a lancé dès le 24 avril 2025 sa saison de surveillance renforcée, notant que tous les départements de la région sont désormais colonisés, à l’exception de la Creuse. Au 1er janvier 2025, le moustique-tigre était présent dans 1 485 communes de Nouvelle-Aquitaine (contre 920 un an plus tôt), couvrant 71 % de la population régionale. L’ARS a déployé des opérateurs spécialisés en démoustication et sensibilisé les collectivités locales aux enjeux de la lutte anti-vectorielle.

La région Provence-Alpes-Côte d’Azur, la plus touchée, a quant à elle mis en place l’opération « Mission Zéro Moustique » les 27, 28 et 29 juin 2025, impliquant les communes dans des journées d’actions préventives avec formations des agents municipaux et sensibilisation du grand public. En 2024, la région avait déjà subi 76 cas autochtones de dengue entre mi-juillet et mi-octobre, un record alors, répartis en 7 foyers dont 41 cas dans le Var et 18 dans le Vaucluse — ce dernier département touché pour la première fois.

Les données d’importation témoignent de l’ampleur du risque : depuis le 1er mai 2025, 1 000 cas importés de chikungunya et 960 cas de dengue ont été détectés en métropole chez des voyageurs revenant de zones épidémiques, principalement La Réunion, Mayotte et les Antilles. Chaque personne infectée constitue une source potentielle de transmission locale si elle est piquée par un moustique-tigre durant sa phase virémique.

Une tendance climatique durable ou un épisode exceptionnel ?

La question demeure ouverte. « L’année dernière, on a capturé le moustique-tigre jusqu’au mois de décembre en région Occitanie. Les moustiques ne sont plus cantonnés à l’été, car l’été s’étend, conséquence du dérèglement climatique », observe le Dr Frédéric Simard, directeur de recherche spécialiste des moustiques à l’IRD de Montpellier, dans une interview accordée à France Info le 1er novembre 2024.

Cette observation soulève une interrogation majeure pour les années à venir : le niveau record de 2025 restera-t-il exceptionnel ou inaugure-t-il une tendance durable liée au changement climatique ? Les autorités sanitaires prévoient de publier un bilan final de la saison de surveillance à la fin novembre 2025, permettant d’évaluer l’ensemble des cas survenus durant cette période prolongée.

La survie hivernale des œufs du moustique-tigre, capable de résister au froid en diapause jusqu’au printemps suivant, garantit déjà que la colonisation du territoire est pérenne. L’enjeu pour 2026 sera de déterminer si les stratégies de lutte préventive — élimination des gîtes, surveillance épidémiologique renforcée, traitements ciblés — suffisent à contenir la transmission de virus tropicaux sous nos latitudes, ou si des mesures complémentaires devront être déployées face à une menace sanitaire désormais installée sur le long terme.

Solution Nuisible

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